mardi 29 décembre 2009

Pick-up : drague sans règles *


"Пикап. Съем без правил" (2009) de Felix Guertchikov (Феликс Герчиков)
Trailers (Трейлеры) & Photos du film (Кадры из фильма)

Et une nouvelle variation sur le thème - galvaudé - des liaisons dangereuses! Celle-ci ressemble fort à "Cruel Intentions" quoique beaucoup moins fidèle au récit de Choderlos de Laclos. C'est bien dommage, car le résultat est beaucoup moins épicé. Dans notre cas nous n'avons que 3 copains concourant entre eux. Les filles sont réduites au rang de proies, à des seconds rôles peu construits où elles apparaissent soient idiotes soit viles, soit le plus souvent les deux.

Le héros du film joué par Andreï Krioukov, est l'archétype du beau gosse de chez qui tu vois une blonde sortir en vitesse, décoiffée et l'air fâchée, à chaque fois que tu lui rend visite. Lui et son Don Juan rival se montrent à l'aise dans leurs personnages cyniques, mais qui ne le serait pas dans un Moscou où le cynisme a été érigée en unique stratégie comportementale menant au succès ? Autant dire qu'ils ne jouent tout simplement pas. Le 3ème larron photographie leurs exploits et s'initie laborieusement à l'amour libre.

Le seul personnage féminin à peu près consistant est la principale victime du trio. Une rousse d'une stupidité et d'une naïveté telle qu'elle est capable sans faire exprès de "dépuceler tout un lycée en un semestre".

Malheureusement, les auteurs du film ne veulent pas montrer la réalité telle qu'elle est et nous servent un happy end ridicule, tombé comme un cheveu sur la soupe. Le méchant cynique est désavoué, les demi cyniques se rachètent (mariage). Les gentils sont très heureux et ont beaucoup d'enfants.

Tant qu'à verser dans les bons sentiments, le film aurait pu nous faire la leçon "puisque vous baisez de ci de là, portez au moins des capotes". Malheureusement, le seul moment où elles apparaissent dans le film, c'est pour symboliser le mal, le sexe sans sentiment. Ils glissent d'une poche et la femme se détourne avec horreur. Pas une fois ils ne sont utilisés lors des nombreuses copulations. Soit dit en passant, ne vous attendez pas à des scènes torrides. Un seul et même maigre téton apparaît à deux reprises, pas de quoi y repenser sous la couette. Ni utile, ni agréable ! Quel est l'intérêt de ce film ? Le cynisme du héros est lui mis sur le compte d'une mère volage dont il a été contraint d'entendre les orgasmes "toute sa jeunesse". Ce pauvre gosse habite sur une planète où le féminisme n'a jamais mis ses pieds poilus. Toute la culpabilité est rejeté sur une mère mauvaise de n'avoir pas couché toute sa vie avec son père. Maman mettait à chaque fois de la musique pour masquer ses cris, ce qui a eu pour conséquence de dégouter le héros de tous les hits des années 90.

Le film s'acharne lui à dégoutter les spectateur de la musique des années 2000. Gêné par l'imbécilité du scénario, le monteur recourt systématiquement à la même musique pour fondre les scènes les unes dans les autres. Une sorte d'ignoble jingle télé nous est resservi à d'innombrables reprises, c'est pourquoi ce film doit impérativement être visionné sur DVD, histoire de pouvoir couper rapidement le son. Tant qu'à faire, évitez tout simplement de le voir !

jeudi 17 décembre 2009

Les films les plus prometteurs de 2010

Mélodie pour Orgue de Barbarie (Мелодия для шарманки) de Kira Muratova. Avec Renata Litvinova et Natalia Buzko, deux actrices fétiches de l'extravagante réalisatrice odessite, qui vient de célébrer son 75ème anniversaire. Le film est achevé, date de sortie inconnue.

Дау d'Ilia Khrjanovsky, réalisateur de l'incroyable "4" (2006)
Ce film actuellement en tournage, serait la biographie romancée de Lev Davidovitch Landau, prix Nobel de Physique 1962 pour ses travaux sur la superfluidité de l'hélium liquide.

Le sourire de Dieu, une histoire odessite (Улыбка Бога, или Чисто одесская история). Une comédie/fantaisie qui saura on l'espère capturer l'humour typique d'Odessa.

Faust d'Alexandre Sokurov. Suite de la série consacrée à la face sombre de l'humanité (Molokh - Hitler, Telets - Lenine, Solntse - Hiro Hito). Faust est achevé, on ignore la date de sortie.

Generation P de Viktor Ginzburg. Une adaptation ultra risquée du fameux roman éponyme de Viktor Pelevine. Le projet d'adaptation traîne depuis des lustres mais il serait désormais fixé sur pelloche et en phase de montage.

La Maison du Soleil de Garik Soukachev
, jusqu'ici connu comme musicien extravagant et fort imbibé. Il s'agit d'un drame psychologique et d'une évocation des hippies soviétiques. Le film est basé sur une nouvelle d'Ivan Okhlobystine et se trouve en phase de montage.

La Face Cachée de la Lune (Обратная сторона Луны), une farce S-F rétrofuturiste avec la découverte d'extra-terrestres sur la lune pendant les jeux olympliques de Moscou de 1980. Avec Vladimir Mashkov et Sergey Garmash.

Soleil Trompeur 2 (déploiement) ; 3 (Citadelle) de Nikita Mikhalkov. Avec Mikhalkov et Menchikov. Déploiement est déjà monté et prévu pour 2010 tandis que la 3ème partie (Citadelle) est actuellement en tournage et devrait sortir en 2011.

mercredi 16 décembre 2009

Korotkoe Zamykanie *****


5 jeunes réalisateurs pètent les plombsTrailers (Трейлеры) & Photos du film (Кадры из фильма)

5 courts métrages, 5 histoires d'amour traitées par 5 jeunes réalisateurs russes grimpant rapidement vers le faîte de leur carrière. Tous possèdent déjà un style extrêmement personnel. Qui a vu leurs films identifie dès les premières scènes leurs auteurs respectifs. Le montage prend soin de placer le générique à la fin de chaque court métrage, permettant ainsi au spectateur de s'exercer à identifier le réalisateur.

Khlebnikov narre l'idylle ratée d'un mélancolique fataliste dans une ambiance prolo et provinciale. Cinéma social, cinéma réaliste et humour désespéré.

Vyrypaïev imagine la vidéo de vacance d'une jeune fille polonaise en week-end à Moscou. Un exercice léger, découverte d'un Moscou estival, absurde, poétique et festif. Un clin d'oeil à l'esprit Russe, qui s'amuse de ne pas être compréhensible par l'étranger.

Bouslov plonge dans le tragique. Un cordonnier sourd-muet écorché vif (au figuré, puis plus tard au sens propre) tombe amoureux d'une paire de guibolles propriétaire des ravissants mocassins blancs qu'il répare. Sa raison se dissolve rapidement dans l'amour à sens unique. C'est noir, intense et bien plus intéressant que les deux premiers long métrages de Bouslov (série des Boomers)...

Guerman, styliste alambiqué, nous entraîne dans un hôpital psychiatrique oublié, délabré, dont l'ambiance désespérante corrompt les esprits au bout de quelques heures. Triste et brumeux comme les rives moldaves du Danube où le film a été tourné.

Serebrennikov réalise un tour de force tragi-comique. Un jeune homme déguisé en crevette pour faire la réclame d'un restaurant décide d'adopter une méthode radicale pour attirer le chalant. Mais en offrant trop d'amour aux passants, il récolte le contraire, avant de découvrir l'amour sous les traits d'une naïade victime d'un autre amour excessif... Bourré de clins d'oeils cinématographiques, littéraires, Serebrennikov termine en beauté la série avec cet exercice de style hilarant.

Filmographie des réalisateurs :
Boris Khlebnikov (Koktebel, Nage libre, Aide de démence)
Piotr Bouslov (Boomer, Boomer 2)
Ivan Vyrypaïev (Euphoria, Meilleur moment de l'année, Antonina s'est retournée, oxygène)
Alexeï Guerman Jr. (dernier train, Garpastum, Soldat de papier)
Kiril Serebrennikov (incarnation de la victime, Raguine, Le jour de Iourev)

mardi 15 décembre 2009

Na Igre [shooté aux jeux] *


Thriller techno nunuche sur un thème éculé
Trailers (Трейлеры) ; Photos du film (Кадры из фильма)

Une bande de potes surdoués pour le jeu en réseau tombe dans les pattes d'un oligarque qui décide d'utiliser leurs talents pour liquider ses concurrents. Les potes gagnent un jeu inédit qui - abracadabra - leur confère des super pouvoirs. Le scénario est fort léger, l'idée de départ n'est qu'un prétexte pour un film d'action assez prévisible. Pas mal d'invraisemblances parsèment la narration et l'inspiration n'impressionne guère. Les amateurs de brouillage réalité/virtuel ne trouveront pas dans ce film un rival au chef d'oeuvre eXistenZ de Cronenberg (1999).

Na Igre est le premier épisode d'une série destinée à enrichir les producteurs du film. Il n'est pas interdit d'espérer qu'ils muscleront un peu leur imagination.

Tsar, de Pavel Lounguine ****


Ivan le Terrible est parmi nousTrailers (Трейлеры); Photos du film (Кадры из фильма)

Où est passé l'humour et la légèreté des précédents chefs d'œuvre de Lounguine? Svadba, Familles à vendre... Pfuit... disparue ! Avec Tsar, le cinéaste poursuit dans la ligné de l'île (Ostrov) sur une thématique historique, sur le pénible rapport à l'histoire des Russes. Sur la culpabilité, sur le pouvoir absolu et la corruption absolue qui en découle. Mais Lounguine dit-il quelque chose de vraiment nouveau en narrant le délire paranoïaque d'Ivan le Terrible, manipulé par un entourage de criminels ? Beaucoup y ont vu un message politique adressé au Kremlin. Si c'est le cas, c'est un message ambivalent. Car le caractère du (véritable) chef d'Etat russe ne ressemble en rien à celui du Tsar campé par ce fêlé de Piotr Mamonov. Poutine rappelle davantage l'Ivan de Eisenstein, qui évoquait timidement Staline. Ce dernier a d'ailleurs manqué faire la peau à Eisenstein et détruire le film. Le Kremlin n'a nullement cherché à entraver la production ou distribution du Tsar de Lounguine. Ce film n'a rien de sulfureux, à la différence d'Oligarque (2002 - brûlot anti Kremlin sorti en France sous le titre "Un Nouveau Russe").

Sous l'angle cinématographique, Lounguine n'a depuis longtemps plus rien à prouver. L'interprétation est soignée (un peu surjoué toutefois, cela fait partie du charme du cinéma russe). À l'exception du personnage de la compagne du Tsar, désagréablement bâclé. Ce qui surprend de la part de Lounguine qui peaufine habituellement les seconds rôles. La photo est très soignée, il n'y a pas de longueurs. Les scènes de torture sont péniblement réalistes. Mention spéciale à l'ours, avec un duel homme/ours particulièrement réaliste et impressionnant. Bravo aux acteurs, aux dresseurs et surtout à l'ours ! Les décors offrent une des meilleures reconstitutions de la Russie médiévale qui ait jamais été imprimée sur pellicule.

Lounguine continue de figurer parmi les meilleurs cinéastes russes actuels. Dommage que l'humour ait radicalement disparu de ses réalisations, c'était une des principales qualités de cinéma. Et un domaine où personne en Russie ne lui arrivait à la cheville.